Diagnostiquer l’infertilité : Tests et procédures pour hommes et femmes

L’infertilité est un problème de santé qui touche de nombreux couples à travers le monde. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), 15% des couples sont concernés par des difficultés à concevoir un enfant après un an de rapports sexuels réguliers non protégés. Diagnostiquer l’infertilité nécessite une évaluation approfondie des deux partenaires, car les causes peuvent être multiples et complexes. 

Cet article explore les différents tests et procédures disponibles pour diagnostiquer l’infertilité chez les hommes et les femmes.

Qu’est-ce que l’infertilité ?

L’infertilité, selon la définition de l’OMS en avril 2023, est une maladie du système reproducteur masculin ou féminin, caractérisée par l’incapacité d’aboutir à une grossesse après 12 mois ou plus de rapports sexuels réguliers non protégés.

L’infertilité peut être rattachée à des problèmes chez l’homme, la femme, ou les deux (et dans certains cas, la cause reste inexpliquée).

L’American Society for Reproductive Medicine (ASRM) a révélé qu’un tiers des cas d’infertilité sont dus à une infertilité féminine, un autre tiers des cas sont dus à des problèmes masculins et les cas restants sont dus à des problèmes chez les deux partenaires ou à une infertilité inexpliquée.

C’est pour cette raison que les deux parties du couple doivent se soumettre en parallèle à des examens d’infertilité, même en cas de cause évidente chez l’un des deux partenaires.

Étapes préliminaires avant le diagnostic

Avant de se lancer dans des tests et des procédures approfondis pour diagnostiquer l’infertilité, il est crucial de passer par des étapes préliminaires. Ces dernières permettent de rassembler des informations essentielles sur la santé globale des deux partenaires et de définir les axes d’investigation les plus pertinents. 

Voici les principales étapes préliminaires :

1. Anamnèse détaillée

La première étape consiste en une anamnèse approfondie des deux partenaires. Le médecin recueille des informations sur :

  • L’âge ;
  • Les antécédents médicaux/chirurgicaux personnels et familiaux ;
  • L’existence d’une maladie chronique actuelle (diabète, maladie auto-immune…) ;
  • La vie sexuelle : les pratiques sexuelles (fréquence et régularité des rapports sexuels, troubles de la libido, troubles de l’érection…), la durée des tentatives de conception, la date d’arrêt de la contraception ;
  • Les cycles menstruels de la femme (régularité, durée, symptômes associés) ;
  • Les antécédents de grossesses, fausses couches, ou complications gynécologiques…

2. Examen physique

Un examen physique complet des deux partenaires est effectué pour détecter des signes cliniques d’anomalies pouvant affecter la fertilité. 

Chez la femme, cela inclut un examen pelvien pour évaluer l’état des organes reproducteurs (rechercher une infection, des bosses/masses ou une sensibilité, qui pourraient être un signe de  fibromes, de tumeurs ovariennes, d’endométriose ou de maladie inflammatoire pelvienne (MIP)). 

Chez l’homme, cela inclut un examen des organes génitaux externes pour détecter des anomalies telles que des varicocèles, vérifier les testicules (pour rechercher des bosses ou des déformations) et le pénis (pour examiner sa forme, sa structure et toute anomalie évidente). 

3. Le mode de vie

Certaines habitudes de vie peuvent avoir un impact significatif sur la fertilité. Le médecin peut donner des conseils pour :

  • Arrêter le tabac et réduire la consommation d’alcool ;
  • Maintenir un poids santé ;
  • Réduire le stress ;
  • Adopter une alimentation équilibrée ;
  • Limiter l’exposition à des substances toxiques (comme les solvants organiques) l’exposition à la chaleur, aux pesticides… 

 

Plusieurs études ont examiné les conséquences des mauvaises habitudes de vie, dont:

-Une étude parue dans la revue scientifique “BMC Public Health”, en 2019 : Elle a examiné les effets du tabagisme sur la fertilité chez les hommes et les femmes. Les résultats ont montré que le tabagisme est associé à une réduction de la fertilité, une diminution de la qualité du sperme chez les hommes, et une altération de la fonction ovarienne chez les femmes.

-Une étude de la revue “The Obstetrician & Gynaecologist” (2018) : Elle a analysé les effets de l’obésité sur la fertilité féminine et les complications pendant la grossesse. Elle a conclu que l’obésité est associée à une réduction de la fertilité, des cycles menstruels irréguliers, et un risque accru de complications obstétricales.

-Une étude intitulée « Exposure to environmental toxicants and fertility: A systematic review » (publiée en 2021 dans la revue « Reproductive Toxicology ») : Elle a exploré les effets de l’exposition aux toxines environnementales sur la fertilité. Elle a conclu que l’exposition à certaines substances toxiques, telles que les pesticides et les perturbateurs endocriniens, peut altérer la qualité du sperme et de l’ovule, ainsi que la fonction reproductive globale.

4. Calendrier de fertilité

Les couples peuvent être encouragés à tenir un calendrier de fertilité pour suivre les cycles menstruels et identifier les périodes de fécondité optimale. Cela inclut la surveillance de la température basale du corps, l’observation de la glaire cervicale, et l’utilisation de tests d’ovulation.

5. Tests de base

Des tests sanguins de base peuvent être effectués pour établir le groupe sanguin et le rhésus et vérifier la santé générale des partenaires, incluant des analyses pour dépister des infections sexuellement transmissibles (IST), des déficiences nutritionnelles, ou des troubles métaboliques.

 

Ces étapes préliminaires sont essentielles pour orienter le diagnostic et déterminer les tests spécifiques à réaliser par la suite. Elles permettent également de mettre en évidence des problèmes de santé plus généraux qui pourraient être résolus pour améliorer les chances de conception.

Diagnostiquer l’infertilité chez les femmes

Bilan hormonal

Le bilan hormonal permet de vérifier les niveaux d’hormones essentielles pour la reproduction. Les principales hormones analysées incluent :

  • L’hormone folliculo-stimulante (FSH) : La FSH est une hormone produite par l’hypophyse qui joue un rôle clé dans le développement des follicules ovariens. Ces follicules contiennent les ovocytes (ou ovules) qui sont libérés lors de l’ovulation.

Elle est mesurée au début du cycle menstruel, entre le troisième et le cinquième jour, et donne une indication de la réserve ovarienne. 

Des niveaux élevés de FSH peuvent indiquer une diminution de la réserve ovarienne, suggérant que les ovaires ont une capacité réduite à produire des ovules viables. À l’inverse, des niveaux bas peuvent signaler des problèmes hypothalamiques ou hypophysaires.

  • L’hormone lutéinisante (LH) : La LH, également produite par l’hypophyse, est essentielle pour le déclenchement de l’ovulation. Elle stimule la libération de l’ovule mature par le follicule ovarien.

Elle est mesurée en conjonction avec la FSH au début du cycle et également autour de la période ovulatoire pour évaluer le pic de LH qui précède l’ovulation.

Des niveaux anormalement élevés de LH en début de cycle peuvent être un indicateur du syndrome des ovaires polykystiques (SOPK), tandis que des niveaux bas peuvent indiquer des problèmes dans la libération de l’ovule.

  • L’estradiol (ou œstradiol) : C’est une forme d’œstrogène produite par les follicules en développement dans les ovaires. Il joue un rôle crucial dans la régulation du cycle menstruel et la préparation de l’endomètre pour une éventuelle grossesse.

L’estradiol est mesuré en début de cycle pour évaluer la réserve ovarienne et pendant le cycle pour surveiller le développement folliculaire.

Des niveaux d’estradiol anormalement bas peuvent indiquer une faible réserve ovarienne ou une dysfonction ovarienne, tandis que des niveaux élevés peuvent être observés dans des conditions telles que les kystes ovariens ou le SOPK.

  • La progestérone : Cette hormone est produite par le corps jaune après l’ovulation. Elle prépare l’endomètre pour l’implantation de l’embryon et soutient la grossesse précoce.

Elle est mesurée en phase lutéale (une semaine après l’ovulation) pour confirmer que l’ovulation a eu lieu.

Des niveaux adéquats de progestérone en phase lutéale sont essentiels pour la préparation de l’utérus à l’implantation. Des niveaux bas peuvent indiquer un défaut de la phase lutéale, affectant ainsi la capacité à maintenir une grossesse.

  • L’hormone anti-müllérienne (AMH) : L’AMH est produite par les follicules en croissance dans les ovaires. C’est un marqueur direct de la réserve ovarienne et est utilisée pour estimer la quantité de follicules restant dans les ovaires.

Elle peut être mesurée à n’importe quel moment du cycle menstruel, car ses niveaux restent plutôt constants tout au long du cycle.

Des niveaux élevés d’AMH sont associés à une bonne réserve ovarienne, tandis que des niveaux bas peuvent indiquer une diminution de cette réserve, ce qui peut être un facteur critique dans le diagnostic de l’infertilité.

Un complément de bilan hormonal peut être nécessaire (par exemple : le dosage de la prolactine en cas de suspicion d’anomalie de l’hypophyse, le dosage des androgènes en cas de suspicion de syndrome des ovaires polykystiques) ;

Échographie pelvienne

L’échographie pelvienne est une procédure non invasive et indolore qui utilise des ondes sonores pour créer des images des organes reproducteurs féminins. Cette technique est essentielle pour diagnostiquer l’infertilité, car elle permet une visualisation détaillée des ovaires, de l’utérus et des trompes de Fallope. Elle aide à détecter des anomalies telles que les kystes ovariens, les fibromes utérins, ou le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK).

Hystérosalpingographie (HSG)

L’hystérosalpingographie (HSG) est une procédure radiologique spécialisée utilisée pour évaluer la forme et la fonction de l’utérus et des trompes de Fallope. Cette méthode est essentielle dans le diagnostic de l’infertilité féminine, car elle permet de détecter des anomalies structurelles ou des obstructions qui pourraient empêcher la conception.

Laparoscopie diagnostique

La laparoscopie diagnostique est une procédure chirurgicale mini-invasive utilisée pour examiner directement les organes reproducteurs internes chez les femmes lorsqu’il existe une suspicion d’anomalies qui ne peuvent pas être diagnostiquées par des méthodes non invasives. Elle est utilisée pour diagnostiquer l’endométriose, les adhérences pelviennes, les fibromes utérins, et les anomalies des trompes de Fallope.

Biopsie de l’endomètre

La biopsie de l’endomètre est une procédure diagnostique qui consiste à prélever un petit échantillon de tissu de la muqueuse utérine (endomètre) afin de l’examiner au microscope. Cette technique est utilisée pour évaluer les causes possibles d’infertilité, de saignements anormaux et pour détecter des anomalies endométriales comme les infections ou les cancers. 

Diagnostiquer l’infertilité chez les hommes

Analyse du sperme (spermogramme)

L’analyse du sperme est le test principal pour évaluer la fertilité masculine. Elle examine plusieurs paramètres :

  • Volume du sperme : Quantité de sperme produite.
  • Concentration des spermatozoïdes : Nombre de spermatozoïdes par millilitre de sperme.
  • Motilité des spermatozoïdes : Capacité des spermatozoïdes à se déplacer correctement.
  • Morphologie des spermatozoïdes : Forme et structure des spermatozoïdes.

Des anomalies dans un ou plusieurs de ces paramètres peuvent indiquer différents problèmes de fertilité :

-Oligospermie : Faible concentration de spermatozoïdes (inférieure à 15 millions/ml d’éjaculat).
-Asthénospermie : Faible motilité des spermatozoïdes.
-Tératospermie : Forte proportion de spermatozoïdes anormaux (anormalité de 96 %).
-Azoospermie : Absence de spermatozoïdes dans l’éjaculat.

Tests supplémentaires : Un deuxième spermogramme peut être recommandé pour confirmer les résultats. D’autres tests, comme des analyses hormonales ou des examens génétiques, peuvent aussi être nécessaires.

Test de fragmentation de l’ADN spermatozoïde

Le test de fragmentation de l’ADN des spermatozoïdes est un examen spécialisé qui évalue l’intégrité du matériel génétique contenu dans les spermatozoïdes. Contrairement au spermogramme classique qui se concentre sur les aspects physiques des spermatozoïdes comme la concentration, la motilité et la morphologie, ce test examine la qualité de l’ADN. Des dommages importants à l’ADN peuvent nuire à la fertilité et augmenter les risques de fausses couches. 

Échographie scrotale

L’échographie scrotale est un examen d’imagerie non invasif qui utilise des ondes sonores pour produire des images des structures à l’intérieur du scrotum. Ce test est utilisé pour évaluer des anomalies responsables d’infertilité chez les hommes, telles que des masses, des varicocèles, des torsions testiculaires et des anomalies structurelles des testicules et de l’épididyme. 

Test hormonal

Comme chez les femmes, les niveaux hormonaux jouent un rôle crucial dans la fertilité masculine. Les hormones testées incluent :

  • La testostérone : Hormone sexuelle masculine principale, essentielle à la production de spermatozoïdes, au maintien de la libido et à d’autres fonctions sexuelles.
  • L’hormone folliculo-stimulante (FSH) : Stimule la production de spermatozoïdes dans les testicules.
  • L’hormone lutéinisante (LH) : Stimule la production de testostérone par les cellules de Leydig dans les testicules.
  • La prolactine : Peut affecter la production de testostérone et jouer un rôle dans la fertilité masculine.
  • L’estradiol : Peut avoir un impact sur la fertilité masculine en régulant la production de FSH et de LH.

Les résultats des tests hormonaux sont interprétés en comparant les niveaux hormonaux avec les valeurs de référence normales. Des écarts par rapport à ces valeurs peuvent indiquer diverses conditions médicales :

-Faible testostérone : Peut indiquer un hypogonadisme, une condition caractérisée par une faible production de testostérone, qui peut affecter la fertilité et d’autres fonctions sexuelles.
-Élévation de FSH et/ou de LH : Peut indiquer une dysfonction testiculaire, comme dans le cas d’une insuffisance testiculaire.
-Niveaux élevés de prolactine : Peuvent être associés à des problèmes de fertilité, bien que d’autres tests puissent être nécessaires pour évaluer l’impact spécifique sur la fertilité masculine.

Biopsie testiculaire

La biopsie testiculaire est une procédure médicale qui consiste à prélever un petit échantillon de tissu testiculaire en vue d’une analyse microscopique. Cette intervention est réalisée pour évaluer la production de spermatozoïdes, diagnostiquer des troubles de la fertilité ou établir un diagnostic dans le cas d’une azoospermie, une condition où il n’y a pas de spermatozoïdes dans l’éjaculat. 

Conclusion

Diagnostiquer l’infertilité est une étape essentielle pour comprendre les causes sous-jacentes et déterminer le traitement approprié pour chaque couple. 

Les tests et procédures disponibles sont nombreux et doivent être choisis en fonction des antécédents médicaux, des symptômes et des résultats des examens préliminaires de chaque individu. Une approche holistique et personnalisée, accompagnée d’un soutien émotionnel et psychologique, est cruciale pour gérer ce défi complexe et délicat.

 

 

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